lundi 12 mars 2012

Les coopératives favorisent la cohésion sociale

Les coopératives favorisent les processus de cohésion sociale, qu’il s’agisse de subvenir à ses besoins, d’avoir voix au chapitre, de se sentir en sécurité ou d’être respectés dans ses différences. Concrètement, ces processus sociaux imprègnent les sphères de la vie quotidienne : la famille, le travail, l’éducation, les loisirs, la vie publique et la vie communautaire.

L’efficacité du modèle coopératif en contexte québécois est évidente. On n’a qu’à citer le Mouvement Desjardins, la plus grande institution financière au Québec, et La Coop fédérée, la plus grande entreprise agroalimentaire.

En santé, les rôles sont à redistribuer dans un contexte pluriel, complexe, qui résiste à l’application uniforme du système public. La prise en charge inhérente au mouvement coopératif permet de mieux s’épanouir sur le plan personnel et collectif. Cette démarche est susceptible de prévenir des maladies tout en réduisant le recours à la médecine curative.

En conformité avec les lois et règlements, les coopératives peuvent aider les citoyens à se prendre en main. Une coopérative de santé est un processus social qui contribue à renforcer le sentiment d’appartenance des membres à la communauté dont ils font partie. Ce lien de proximité unit les gens autour des valeurs qu’ils partagent et des services qu’ils se donnent. Par exemple, les usagères et usagers s’impliquent dans la prévention, la responsabilisation, la promotion de saines habitudes de vie et le développement de services complémentaires non assurés par la Régie de l’assurance maladie du Québec.

Avoir confiance en ses capacités donne le goût de façonner l’avenir... L’ensemble des innovations coopératives en santé ne sera pas épuisé à court terme, ni durant la prochaine génération. Comme ce fut le cas pour les caisses Desjardins, c’est une œuvre de cent ans, qui vient à peine de commencer!

jeudi 15 décembre 2011

Consensus explicites pour une société équitable et conviviale

La décision en matière de gestion dans l’espace public et parapublic ne peut plus reposer comme autrefois sur un rapport d’autorité, sur une simple assertion ou sur un consensus présumé. On ne doit pas non plus se contenter de l’absence d’objection majeure à une proposition pour l’adopter. La décision doit plutôt être élaborée à la suite de consultations et faire l’objet d’un consensus explicite.

Au cours des dernières années, les mécanismes de régulation des demandes formulées par les diverses composantes de la société se sont multipliés: forums, consultations publiques, tables de concertation, codes de conduite pour les lobbyistes, etc. L’émergence de groupes et d’organisations efficaces aux intérêts pluriels ont complexifié les processus de décision. Ces groupes et organisations exercent leur influence notamment au moyen de stratégies de communication auprès de l’opinion publique et des pouvoirs politiques.

Les demandes acheminées aux centres décisionnels sont de plus en plus nombreuses et de mieux en mieux étayées. Dans ce contexte, la décision idéale doit reposer sur des constats et des faits vérifiables. Elle doit être soutenue par un argumentaire solide et respecter des règles socialement reconnues. C’est à ce niveau que le leadership coopératif, qui s’exerce horizontalement, prend toute son importance. Être capable comme individu, groupe ou organisation de susciter collectivement la réflexion, puis de rallier et de mobiliser les gens, voilà des qualités fondamentales pour une plus grande cohésion sociale.

Cinquante ans après la Révolution tranquille, les années 2010 ouvrent une nouvelle ère qui appelle les gens à se mobiliser pour une société équitable et conviviale. Qu’il s’agisse de subvenir aux besoins de subsistance et d’épanouissement, d’avoir droit au chapitre, de se sentir en sécurité et d’être respecté dans ses différences. Affirmons notre autonomie! Maîtrisons notre destin!

mercredi 19 octobre 2011

Un milieu de vie qui prend en charge sa santé

Les tendances observées dans le monde du travail font apparaître des défis de santé d’ordre physique et psychologique. Les impacts affectent toutes les sphères de la société. Alors que les technologies nous relient virtuellement partout sur la planète, la coopération peut nous unir réellement dans notre milieu de vie, sur une base volontaire. Pourquoi pas autour de notre bien le plus précieux?

La communauté universitaire de Sherbrooke a réalisé deux percées en santé organisationnelle. La première en 2002, en donnant naissance à Universanté, un programme de mieux-être géré par et pour le personnel. La seconde en 2007, en fondant la Coop santé pour assurer la survie d’Universanté et l’étendre à la population étudiante.

La Coop santé a accentué l’adoption et la consolidation de comportements préventifs. Elle a favorisé l’activité physique régulière, une bonne alimentation et l’entraide psychologique. Ainsi, la communauté universitaire est un laboratoire vivant de prise en charge et de responsabilisation en santé. Grâce à la coopération, elle renforce le pouvoir que nous pouvons exercer sur nos conditions de vie et notre environnement. L’effet multiplicateur s’étend aux conjoints, aux enfants et amis, ainsi qu’aux entreprises qui embauchent des diplômés actifs.
 
La prévention, c’est l’avenir de notre santé, et la coopération, c’est l’avenir de notre société. La Coop santé de l’Université de Sherbrooke réunit ces deux clés de notre devenir. Notre nouveau médium lance un nouveau message: la santé en commun. Par analogie avec le transport en commun, la coopérative (le véhicule) est aussi importante que la santé (la destination).

mercredi 14 septembre 2011

Les coopératives ont des balises

La voie coopérative rend possible la participation à la propriété (part sociale nominative), au pouvoir (une personne, un vote), à l’utilisation (créatrice de la richesse) comme travailleur, consommateur ou fournisseur, ainsi qu’aux résultats (affectation des trop-perçus à la réserve, aux membres ou à la communauté). L’idéal coopératif s’articule en huit balises: la démocratie, l’égalité, l’équité, la solidarité, l’honnêteté, la transparence, la responsabilité sociale et l’altruisme.

La démocratie exige un vote par personne, sans tenir compte du statut ni du capital investi. Ainsi, la personne est placée au centre du projet coopératif. L’égalité était la valeur supérieure des premières coopératives, à tel point que certaines payaient le même salaire pour tous les métiers et donnaient la même ristourne à chaque membre. Aujourd’hui, l’égalité veut que tous jouissent des mêmes droits peu importe les différences individuelles. En vertu de l’équité, chacun reçoit en fonction de son apport. Les bénéfices sont proportionnels aux activités (ou à l’usage) économiques du membre avec sa coopérative.

La solidarité commande l’assistance entre membres et dans la collectivité. L’honnêteté consiste non seulement à observer les lois et règlements, mais aussi à agir de bonne foi selon sa conscience. La transparence exige la communication des informations pertinentes, c’est-à-dire utiles, exactes et à la portée de tous. La responsabilité sociale tient compte de l’impact de la coopérative dans la communauté. L’altruisme se manifeste dans le dévouement désintéressé à autrui.

Le Réseau d’investissement social du Québec (RISQ) résume en quatre axes l’essentiel des balises que je viens d’évoquer : 1) primauté de l’humain et de l’emploi sur le capital, 2) prise en charge individuelle et collective, 3) processus de décision démocratique, 4) production de biens et de services socialement utiles.

dimanche 11 septembre 2011

Les valeurs familiales m'influencent

Durant mon enfance dans les années 1950, mes parents m’ont donné l’exemple de l’entraide. À la campagne, les voisins s’épaulaient quand leur récolte était menacée ou quand un malheur survenait à l’un d’eux.

Mon père avait un sens inné de la justice. Il n’était pas instruit, mais il établissait une différence entre le droit du plus fort et la justice qui était censée s’appliquer à tous. Ma mère était davantage préoccupée de l’amour du prochain. Elle pardonnait à ceux qui lui avaient fait du tort et voulait être pardonnée par ceux qu’elle avait offensés.

Ma mère m’a inculqué qu’il faut prendre soin des autres et mon père qu’il faut prendre soin de soi. Je retiens aussi de ma mère la prière et la méditation, et de mon père, le travail bien fait.

Comme mes parents, qui ont mené une vie simple, je vis modestement, à l’écart des foules. J’aime me retirer du monde extérieur avant de poser un geste public, pour me concentrer sur le sens à donner à mon action.

vendredi 9 septembre 2011

Vers une meilleure civilisation

Le coopératisme apparaît comme un idéal à condition d’en appliquer les valeurs distinctives. Cette approche motivée par le service plutôt que par le profit s’inscrit dans l’histoire de la nation québécoise et par conséquent dans mon cheminement. Durant la période religieuse qui a prévalu jusqu’à 1960, j’ai vécu dans mon enfance les relents de la survie comme peuple à la campagne. On avait des familles nombreuses. Les gens s’épaulaient. On faisait beaucoup avec peu.

Avec l’instruction et l’ouverture sur le monde qui ont marqué la période sociale-démocrate des années 1960 à 1980, est venue l’affirmation de l’ego. On a aussi émigré en ville.

Depuis 1980, nous sommes entrés dans la société de consommation, puis dans la mondialisation. En 50 ans, nous sommes passés d’une société repliée vers l’intérieur à une société tournée vers l’extérieur. Le matériel a pris le dessus sur le spirituel et l’individuel sur le collectif.

Desjardins a suivi la même évolution en s’affirmant comme institution financière francophone devant les riches banques anglophones. Actuellement, le mouvement coopératif existe à l’ombre du capitalisme tout puissant et évolue parallèlement au monde politique. D’un côté, il craint de faire des vagues. De l’autre, les médias l’ignorent et les politiciens l’assimilent à la branche privée de l’économie. L’actuelle Direction des coopératives est l’une des 35 directions que compte le ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation du Québec, ce qui est loin d’en faire une priorité.

Savoir d’où l’on vient nous guide vers où l’on va: alors que le coopératisme est encore généralement réduit à un modèle d’affaires, ses pionniers ambitionnaient de changer le monde. Je souhaite que nous acceptions notre diversité comme une richesse; que notre complémentarité soit notre force; et je rêve que le Québec soit le laboratoire d’une meilleure civilisation qui puisera dans les valeurs coopératives.

jeudi 1 septembre 2011

Réveiller l’énergie coopérative endormie dans les millions de membres

En 1980, j’ai publié un manifeste intitulé La Bombe C…  En proposant de créer des comités d’information dans chacune des 1400 caisses populaires et d’économie de l’époque, je voulais réveiller l’énergie coopérative endormie dans les millions de membres.

L’année suivante, avec mon épouse, Marcelle Stratford, j’ai fondé le Mouvement Renouveau Politique inspiré du coopératisme pour relancer la vie sociale et économique, et axé sur l’État-arbitre pour alléger les administrations publiques. L’éditorialiste de La Tribune de Sherbrooke a commenté ainsi notre initiative: «Le discours du couple Stratford […] s’adresse au cœur et à l’âme. Il cherche d’abord à provoquer une prise de conscience, à transformer les mentalités.»

Dans une nouvelle version inédite de la Bombe C datée de 1983, intitulée Le temps s’en vient, j’ai essayé de préciser le lien entre ce que j’appelais la «mutation spirituelle» et le coopératisme «en tant que nouveau régime économique, politique et social fondé ni sur la recherche du profit ni sur la lutte des classes, mais plutôt sur l’organisation de l’entraide». Aussi, j’ai appliqué aux sciences sociales la formule bien connue dans les sciences physiques, E = mc2, où j’annonçais que l’Énergie serait le produit de trois facteurs principaux, soit la Motivation, la Coopération et la Communication.

En 1985, j’ai rédigé une troisième version inédite intitulée Mon option. En introduction, j’ai précisé «que le coopératisme dont je parle n’est pas les coopératives actuelles, ses institutions restant à inventer en grande partie. Les coopératives conçues en vue de la recherche systématique d’un profit matériel, ou fonctionnant de fait dans cet esprit, peuvent n’être qu’une autre forme d’entreprise capitaliste. Quant aux coopératives créées dans le giron de la lutte des classes, elles peuvent servir également d’autres fins que l’entraide. Or, l’entraide est le fondement spécifique du coopératisme.»

Ce grand rêve, je l’ai vécu au quotidien dans mon travail, discrètement. Il continue de m’habiter. Je demeure porté à rassembler plutôt qu’à diviser. Je cherche à résoudre les conflits. Mon aspiration rejoint celle d’Antoine de Saint-Exupéry pour qui le plus beau métier était d’unir les gens.